Une prière, de nombreuses traductions

«  Ne nous laisse pas entrer en tentation » – Mais on nous a changé le Notre Père ! Pourtant, on a toujours dit comme cela  !
Eh bien, en fait  non !

Avant 1966, dans les églises francophones issues de la Réforme, nous disions pour la demande  « ne nous conduis pas  (ou ne nous induis pas) dans la tentation », voire parfois même : « et ne nous laisse pas succomber à la tentation ».

Survint le Concile de Vatican II, et avec lui le passage à une récitation systématique en français et l’adoption du tutoiement par nos sœurs et frères catholiques.

L’épiscopat  français, en concertation avec la Fédération Protestante de France et les églises protestantes, proposèrent alors la traduction que nous avons pris l’habitude de dire : « et ne nous soumets pas à la tentation ».

A partir des années 2000, les évêques francophones entreprennent un large travail de révision des textes liturgiques et du lectionnaire. Cela aboutit en 2013 à la réception d’une nouvelle traduction liturgique de la Bible et, par suite, des différents textes lus lors de la messe. La traduction du Notre Père est alors impactée sur une seule demande : « Ne nous soumets pas » devient  « ne nous laisse pas entrer ».

Comme en 1966, la Fédération Protestante de France  en est informée par l’épiscopat catholique français  et, lors du synode national de 2016, l’Église protestante unie de France  recommande d’adopter la nouvelle formulation.

Pourquoi ? Cette traduction serait-elle meilleure ? En fait, ce n’est pas certain !

Les exégètes et les dogmaticiens sont partagés sur la question. Pourtant elle ne me semble pas pire. Car en fait, ce texte du Notre Père présente quelques difficultés majeures de traduction, difficile d’en rendre compte en quelques lignes. Pour ceux que cela intéresserait et afin d’aller plus avant, se référer au site de l’EPUdF et au n° 1 de la revue Ressource : « Prier ensemble le Notre Père).

En quelques mots, l’ancienne formulation «Ne nous soumets pas à la tentation» laissait supposer une certaine responsabilité de Dieu dans la tentation qui mène au péché, comme s’il pouvait être l’auteur du mal. Mais la nouvelle proposition laisse supposer qu’il pourrait exister une vie sans « tentation », ce qui est impossible.

De fait, la question est aussi de savoir le sens même du mot « tentation » : que voulaient dire par là Matthieu et Luc ?  Que comprenons-nous aujourd’hui ?

Pour creuser cette question, quelques ressources sur notre site : la prédication de Jacques-Noël Pérès (le 3 décembre 2017 à Saint-Jean), puis la mienne (le 10 décembre 2017). Plus anciennement et plus critique, l’article de Frédéric Chavel d’octobre 2013.

Ainsi, aucune traduction n’est in fine satisfaisante, et la décision du Synode de Nancy a donc été de recommander la nouvelle formulation afin de rester en communion avec nos sœurs et frères catholiques.

Ce qui est avantageux dans cette histoire, c’est que cela puisse nous aider à faire davantage attention à ce que nous disons lorsque nous le disons et de réfléchir sur ce qu’est la prière pour chacun d’entre-nous !

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